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Vendredi 5 Novembre 2004, Paris, Théâtre du Châtelet.
Voici la nième représentation à laquelle j'assiste. Ce soir, Hélène Grimaud et le Cincinnati Symphonie Orchestra dirigé par Paavo Järvi vont jouer le 4e concerto pour piano de L. Van Beethoven. La salle est pleine, comme d'habitude. Hélène Grimaud semble attirer à elle toutes les générations.
C'est d'ailleurs par ce concerto que j'ai fait mes premiers pas dans " le monde " d'Hélène Grimaud. J'ai tout d'abord aimé, outre sa virtuosité, la fougue grave qui la caractérise. Cette espèce d'intelligence profonde, où la légèreté sait côtoyer le vif. Hélène nous transporte littéralement où elle désire, ou plutôt devrais-je dire, où le compositeur désire. L'artiste jouant le rôle de canal.
C'est dire si j'attendais avec une appréhension ce nouveau voyage, car après avoir vu maintes et maintes fois cet autre monde, je me demandais si je serais réceptif de la même manière…
Le concert débute. Hélène semble être fatiguée. Le ton paraît moins fougueux, plus doux, lié. Pas mou, simplement plus paisible. Une douceur rêveuse, le voyage s'annonce ouaté, si la magie opère.
Elle ne tarde pas à opérer cette magie. Sa douceur nous entoure et nous porte vers l'autre monde.
L'orchestre est dirigé d'une main ferme et tout aussi douce. Le ton est résolument profond et serein. Il se dégage comme une atmosphère de Sagesse de l'œuvre, que je n'avais alors jamais entendu. C'est tout simplement splendide, encore une fois.
Peut-être devrait-on simplement dire que c'est la magie de Beethoven que l'on voit opérer, mais il me semble que ce n'est pas tout. En effet, si le but du voyage est d'arriver à destination (si on y arrive !!), il n'en demeure pas moins que la manière dont on voyage est tout aussi importante. Et c'est exactement là que l'interprète à sa place. C'est pour cela que l'on ne peut juger les interprètes, car il n'appartient qu'à nous de choisir notre médium (le terme ici prenant tout son sens). Pour ma part, Hélène Grimaud est un médium qui me convient parfaitement, ce qu'elle voit et ressent m'est transmis à travers la musique, mais aussi à travers un fil invisible qui semble nous relier dans ces moments privilégiés. Nous devons êtres beaucoup à ressentir cela, puisqu' Hélène est très généreuse.
Merci à vous Hélène pour tous ces moments que vous donnez et que nous recevons avec le cœur ouvert. Si ce n'est pas pour rien que vous vous sentez poussée vers certaines œuvres, ce n'est pas pour rien que nous nous ouvrons à elles, à travers vous.
Remy Choquet
remy.choquet@gmail.com
Après avoir entendu un 4ème concerto de Beethoven, la semaine
dernière, interprété par E. Kissin, extrêmement brutal, articulé à
l'extrême, décalé avec l'orchestre au point de faire pouffer quelques
seconds violons, prosaïque et ennuyeux (diffusé demain sur france
musique), la version qu'en a donné Hélène hier soir était un
enchantement.
A la différence de ses autres enregistrements et versions concert,
elle a choisi de limiter son interprétation entre les nuances
pianissimo et mezzo forte, qu'elle ne délaissait que rarement pour
quelques rares incursions dans le forte, toujours pertinentes. ce
choix de douceur et de tendresse, -il serait trop facile de le
dire "féminin"- révéla un Beethoven tel qu'on l'a peu entendu
jusqu'alors. Le second mouvement, si difficile à interpréter, le fut
avec un soin inouï, le piano déployant une longue plainte de temps en
temps interrompue par les accents sévères de l'orchestre, concourant
à la création d'un contraste idéal.
La suite du concert a démontré s'il en était encore besoin toutes
les qualités de cet orchestre dans une cinquième de Mahler
magnifique, et en bis la superbe (et de bon ton) valse triste de
Sibélius.
Jérémie Leroy-Ringuet
leroyjeremie@yahoo.fr
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